Belle et cultivée, fille d'un marchand de cordes, Louise épousa après une vie aventureuse un riche cordier de lyon, d'où son surnom de Belle Cordière.
Elle écrit des poèmes à une époque où la production poétique est intense. Sa culture est aussi celle de la Renaissance italienne. Elle prend vigoureusement position contre la façon dont
Jean de Meung achève
le travail interrompu de son prédécesseur
Guillaume de Lorris, en passant d'un récit mythique et symbolique à des descriptions bien plus terre à terre, et même sensiblement misogynes. Ce sera en pure perte : le Roman de la rose connaîtra un succès considérable.
L'œuvre de Louise Labé, très mince en volume (662 vers), se compose d'un Débat de Folie et d'Amour, de trois
Élégies et de vingt-quatre
sonnets, lesquels expriment les tourments féminins de la passion.
VIII
Je vis, je meurs : je me brule et me noye
J'ay chaut estreme en endurant froidure :
La vie m'est et trop molle et trop dure.
J'ay grans ennuis entremeslez de joye :
Tout à un coup je ris et je larmoye,
Et en plaisir maint grief tourment j'endure :
Mon bien s'en va, et à jamais il dure :
Tout en un coup je seiche et je verdoye.
Ainsi Amour inconstamment me meine :
Et quand je pense avoir plus de douleur,
Sans y penser je me treuve hors de peine.
Puis quand je croy ma joye estre certeine,
Et estre au haut de mon desiré heur,
Il me remet en mon premier malheur.
8
Je vis, je meurs ; je brûle et je me noie ;
j'ai très chaud tout en souffrant du froid ;
la vie m'est et trop douce et trop dure ;
j'ai de grands chagrins entremêlés de joie.
Je ris et je pleure au même moment,
et dans mon plaisir je souffre maintes graves tortures ;
mon bonheur s'en va, et pour toujours il dure ;
du même mouvement je sèche et je verdoie.
Ainsi Amour me mène de manière erratique ;
et quand je pense être au comble de la souffrance,
soudain je me trouve hors de peine.
puis quand je crois que ma joie est assurée
et que je suis au plus haut du bonheur auquel j'aspire,
il me remet en mon malheur précédent.
Oeuvres de 1555. (Sonnets)